7 ANS AVEC SES VIEUX

par Hiel
J’appréhendais ce moment. Léna nous en parlait depuis des semaines…C’était coché sur son calendrier, pas la peine d’esquiver, elle voyait bien que l’échéance approchait! Et nous, nous… petits malins que nous sommes, tout contents de notre vie nomade, qu’est-ce qu’on avait à lui proposer pour fêter ça? Un beau rien du tout…
 
-”J’pourrai inviter Camille, dis, Maman?
-Ah bah, l’inviter, oui, mais elle ne pourra pas venir…
-Et Ella et Enaëlle, elles viendraient, elles? Juste pour le gâteau…
-Tu sais ma chérie (technique d’introduction d’adjectifs mielleux pour faire passer la pilule de ce qui va suivre), ce n’est pas qu’elles ne veulent pas venir, elles adoreraient venir, je pense, fêter tes 7 ans avec toi, mais c’est que venir jusqu’ici, prendre l’avion, ça coûte cher!
-Mais moi j’aimerai troooop, les voir, mes copiiiiiines…”
Bon, Christophe, une idée, là, tout de suite, maintenant…Qu’est-ce qu’on fait pour le fêter, son anniv??? Il m’a regardé, hébété, comme si la solution devait forcément venir de moi, et je lui ai renvoyé ma détresse, lui montrant mon panier de solution résolument vide. Puis, à peine 5 minutes plus tard, elle m’a sauvé. Elle m’a sauvé de mes ruminations. Vous savez, le p’tit vélo dans la tête, embourbé entre désolation et remords. Il s’est arrêté net.

“-Sinon, on pourrait aller à la piscine et au Galipy* pour mon anniversaire?

– Je veux pas de cadeau mais je veux aller à la piscine tous ensemble.
-Oh bah oui, oui oui, ouiiiii, ma chérie, ça, on peut!”
 
J’aurai tant aimé qu’elle invite ses copines pour partager son gâteau d’anniversaire. J’aurai tant aimé qu’elle vive cela comme toutes les petites filles de son âge. Notre choix de voyage, je le sais, lui enlève ce genre de plaisir. Les anniversaires sont des dates importantes pour un enfant. Je me souviens des miens, chacun était anticipé, rêvé, fantasmé. Ce n’est pas le seul fait d’avoir des cadeaux (quoique forcément un peu) mais aussi et surtout le fait d’être un peu le roi ou la reine de la journée, entouré des gens qu’on aime.

J’appréhendais beaucoup cette journée, en me disant que ce moment passé dans l’aire de jeux et cette piscine ne pourraient pas consoler entièrement le manque de ses copines. Qu’à un moment donné, forcément, elle nous le remettrait dans les dents, au meilleur moment de la journée, pour sûr, à la première bouchée du gâteau par exemple… Elle allait nous le reprocher, inéluctablement, qu’elle aurait aimé le fêter avec son papi et sa mamie, Mamoune et les cousins/cousines.

Mais non. J’ai pu finir ma part trois chocolats tranquillement, et nous sommes allés à l’aire de jeux: on a couru les uns derrière les autres, se cachant entre deux poteaux roses et bleus (mon Dieu que les architectes d’aires de jeux d’enfants sont neuneus, comme si un espace décoré avec goût ne pouvait pas plaire aux enfants!), entre des dizaines d’autres enfants, on a même rigolé (sisi, moi à courir avec Jona en portage et essayant de me cacher derrière un poteau de 10 cm de diamètre, c’était très drôle).

On a même acheté un paquet de bonbons, c’est dire!!!! Totale anarchie, cet anniversaire!!!!
 
Puis nous sommes rentrés, elle a répondu aux appels de la famille et des copains. Elle était quand même un peu la reine du jour.
 
Enfin, nous avons lancé le plus haut possible les ballons de baudruche, et Léna m’a dit entre deux envolées qu’elle avait passé une belle journée d’anniversaire. Ouf. Moi qui avais si peur qu’elle soit déçue, que cette journée la rende triste…
 
Finalement, elle m’aura épatée, de par sa simplicité, son envie d’être -encore!- avec nous à vouloir fêter ses 7 ans, ne nous reprochant aucunement notre mode de vie qui, je le sais, laisse parfois des traces dans son parcours de petite fille.
 
 Le lendemain, comme promis, nous sommes allés tous les 5 à la piscine. Elle était aux anges, riait aux éclats. Je suis ravie , car tout ce que je ne veux pas, c’est bien de briser leur rêve.
 
Oh, vous me direz, on aurait été sédentaires, ça n’aurait peut-être pas été si différent. Je ne suis pas de celles qui en font des tonnes pour les anniversaires. Je n’aurai pas invité la moitié de sa classe, je n’aurai pas non plus fait moi-même deux ou trois gâteaux magnifiques colorés (il manquerait plus que je les intoxique en plus!) et je n’aurai pas acheté des petits jouets ou bonbons pour remercier les copains de venir. Je n’aurai pas préparé non plus une super chasse aux trésors ni des activités pour occuper les enfants. J’aime les choses simples. Je pars du principe que les pâtissiers savent bien mieux faire les gâteaux que moi, que des enfants réunis, ça ne s’ennuie pas (oui, ça met du bazar mais bon, une fois par an, je tolère^^) et que si en plus faut acheter des cadeaux aux enfants qui viennent, on en finit plus! Ca me dépasse un peu tout ça.
 
Alors, on aurait été en France, Léna aurait fêté simplement son anniversaire avec une copine de Bretagne, Camille, on l’aurait sûrement invitée un week-end à la maison, puis avec Ella, et sa famille.

Sans une multitude de cadeaux, sans une fête démesurée, juste être avec les gens qu’elle aime. C’est la seule chose que je regrette ne pas avoir pu lui offrir…

Ce n’est vraiment pas évident de concilier nos envies avec celles de nos enfants.

Quoiqu’on fasse, je sais qu’on aura des reproches ou du moins des questionnements légitimes de leur part.

On voyage, ils sont ravis de ne pas être restés à l’école. Même si l’expérience était sympa, il y a cette liberté d’apprendre qu’ils savent bien reconnaître. Ils découvrent ce qu’ils veulent sans contrainte. Ils veulent lire, on lit, ils ne veulent pas, on laisse le temps faire. Ils expérimentent à leur guise les sujets qui les intéresse et les rien quand ils n’en ont pas envie. Cette rigidité scolaire de devoir rester assis de nombreuses heures, de ne pas choisir ce qu’ils vont faire, d’être cadrés, ils s’en passent volontiers.
 
Cette façon de vivre, sans avoir à se lever à heure fixe, à se coucher à heure fixe, en arpentant chaque mois des cadres de vie différents, ils adorent, ils le répètent assez. Mais ils pourront toujours nous reprocher de les avoir éloignés de leur famille et amis.
Ce n’était pas l’anniversaire de ses rêves, mais nous étions ensemble et c’et déjà beaucoup!
On serait restés sédentaires, ils nous auraient reproché d’être de vieux croûtons qui n’auraient pas osé vivre leur rêve, que eux feront mieux, qu’on les a laissés croupir sur les bancs d’école … et je ne sais quoi d’autre.
On se prépare donc, mentalement, à ce qu’un jour, notre gentille petite fille qui, finalement, aura passé un bon anniversaires avec ses vieux parents et ses frères, nous rappelle gentiment qu’elle n’“avait rien demandé, elle, et qu’elle aurait préféré l’autre option école “(dont, je le rappelle, juste le mot aujourd’hui la ferait presque vomir^^)
 
Il en est ainsi. Aujourd’hui, on vit cette vie de nomade où l’on voyage, et c’est désormais sûr, nous rentrerons quelques mois en France pour nous permettre de rétorquer quand le moment sera venu, qu’on aura quand même tout fait pour qu’ils soient heureux, en mixant ce voyage à des retours en France réguliers!
 
Nous serons donc en territoire connu pour les 1 an de Jona, fin Octobre.
 
Cela nous laissera du temps pour profiter de Nantes, Chartres, de retourner voir les amis bretons et les copains/copines des enfants et de passer les fêtes de Noël en famille. Puis de repartir en Janvier. En attendant, nous profitons de ce temps estival à l’étranger, de cette vie moins chère et des beaux coins macédoniens que nous découvrons au fil des jours.
 
A très vite.
 
*Galipy: Aire de jeux intérieure près de Nantes. Désormais, à chaque fois que Léna ou Lissandre voient une aire de jeux intérieure, ils l’appelle ainsi.

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